Erre J.M. – Prenez soin du chien

Après avoir lu “Le mystère Sherlock” et “Série Z” de J.M. Erre (merci Niki), difficile de s’arrêter en si bon chemin. Alors place à “Prenez soin du chien” son premier roman paru en 2006. Je dois avouer qu’en ces temps un peu moroses j’avais envie de sourire et même de rire. Le premier opus de J.M. Erre était-il à la hauteur des deux textes précités ? Là était la question…

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L’intrigue

Le 5 rue de la Doulce-Belette, dans le neuvième arrondissement de Paris est un immeuble plutôt tranquille, enfin l’était jusqu’au 1er juillet quand Mme Ladoux, la concierge, a du appeler la police. “La Petite Sœur de Pigalle”, Mlle Chiclet, une gentille dame de soixante et un ans ayant été assassiné… Deux mois plus tard, Max Corneloup emménage dans l’appartement de la défunte, bienheureux d’avoir enfin trouvé un logement, car avoir un toit à Paris quand on est auteur de roman-feuilletons radiophoniques ET célibataire, est une galère quasi sans fin.

Tout serait merveilleux s’il n’y avait le voisin d’en face, au 6 de la rue Doulce-Belette, qui a emménagé le même jour que lui. Un certain Eugène Fluche, peintre sur coquilles d’œuf, qui semble l’épier en permanence. En fait chacun suspecte l’autre de l’espionner.

Mais s’il n’y avait que M. Fluche… En fait les locataires des deux immeubles sont tous un peu particuliers, voire pas très sains d’esprit. À commencer par les deux concierges. Celle du 5, Mme Ladoux, très soucieuse du bien-être des locataires et de la respectabilité de son immeuble, une “maison de standing” hébergeant des “membres du show-biz” (écrivain et cinéaste). Elle a l’habitude d’écrire à sa vieille mère, décrivant en long et large les divers événements de l’immeuble et de ses habitants, sans oublier de les agrémenter de tout ce qui fleuri dans son imagination naïve et fertile. Au 6 de la rue, c’est Mme Polenta qui tient la loge, trentenaire radieuse à la plastique exceptionnelle, beaucoup plus arrangeante avec ses locataires, en faisant même fantasmer quelques uns. Pour Mme Ladoux elle est l’ennemie absolue.

Parmi les locataires, outre les nouveaux arrivés que sont Corneloup et Fluche, on a Mr Zamora Le Cinéaste, “réalisateur” introverti qui crée des films à partir de plans d’autres films. Raphaël Dumoget éleveur passionné de gerbilles, dans son appartement, et qui les revend dans les diverses animaleries de la capitale. Lazare Montagnac, auteur de romans érotiques très particuliers eux aussi ; une mère et son jeune garçon Bruno, délinquant plus qu’en herbe, la terreur dans la cage d’escalier du n°5 et qui ferait bien de prendre quelques kilos de Ritaline le matin au petit déjeuner.
Autant de personnages qui ne dépareraient pas dans un asile psychiatrique plutôt que dans de tranquilles immeubles parisiens. Sans oublier Mme Brichon et son chien Hector, mystérieusement disparu, qui passe ses journées à écrire à M. Naudet, le représentant de l’énigmatique propriétaire de l’immeuble, ainsi qu’une veuve à moitié folle, officiant comme femme de ménage chez divers locataires, et son fils autiste.
On ajoute à cela lettres anonymes, menaces, persécutions en tous genres, saut à l’élastique et aplatissement par carton de livres. En quelques mois tout ce joli monde va sombrer dans une paranoïa générale, chacun soupçonnant chacun de tous les méfaits possibles et imaginables. Heureusement que le commissaire Taneuse veille au grain…

Alors ?

J-M-ErrePas de long mystère, paru en en 2006 chez Buchet-Chastel en 2006 (en poche chez Points Seuil en 2007) ce premier roman par de J.M. ERRE est détonnant ! C’est le troisième roman de cet auteur que je lis et comme pour les deux premières fois j’ai été bluffé. Le seul souci, peut-être, est cette écriture hyper addictive, je m’inquiète de devenir dépendant à ces histoires complètement loufoques et pleines d’humour. Rire tout seul en lisant un livre, cela fait du bien !

Nous sommes donc au plein cœur d’une parodie de polar avec cependant du suspense et de multiples rebondissements. Traité comme un roman feuilleton, un roman à tiroirs, les scènes se succèdent à un rythme rapide. La narration alterne en permanence entre articles du “Paris Massacre”, extraits des journaux intimes de Max Corneloup et Eugène Fluche, lettres de Mme Brichon à M. Naudet et celle de Mme Ladoux à son vieille mère. Sans oublier de réguliers résumés de la situation, en italique dans le texte, d’un mystérieux inconnu. Ces affrontements essentiellement à distance, renforce les délires paranoïaques des personnages principaux.

Tout est hors norme, déjanté et loufoque, teinté de cynisme et d’humour noir. L’imagination féconde et foisonnante de l’auteur, sa plume jubilatoire et malicieuse, son intrigue extravagante nous tient en haleine du premier au dernier mot et si je ne l’ai pas lu d’une seule traite c’est simplement que mes yeux ne voulaient plus rester ouverts.

Même si j’avais mon idée sur le responsable de tout ce bazar bien avant la fin du roman, cela ne nuit en rien à l’intérêt pour le texte. Car même si on connait le coupable, en connaître les motifs est une autre paire de manches. Petit clin d’œil à M. Zamora, le réalisateur dont les films ne sont qu’une compilation de plans et de scènes extraits de longs-métrages tournés par d’autres, il pourrait être un peu le précurseur du héros de “Série Z”, mais surtout et aussi l’auteur lui-même qui, plus jeune, se rêvait cinéaste. Aujourd’hui il est écrivain mais aussi est professeur de lettres au lycée Joliot-Curie de Sète, j’aurai bien aimé avoir un tel enseignant, ses élèves ne doivent pas s’ennuyer.

Au final, un seul conseil, À LIRE ABSOLUMENT !

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5 Commentaires
  1. 26 décembre 2014
    • 26 décembre 2014
  2. 8 janvier 2015
    • 8 janvier 2015
      • 8 janvier 2015

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